Écrire le cinéma
Octobre 2006, Marie-France Briselance, avec la collaboration de Jean-Claude Morin, publie « Leçons de scénario – Les 36 situations dramatiques »*, où, à partir d’un essai que Georges Polti écrivit en 1936 à propos du théâtre, elle démontre que les scénarios de tous les films sont tributaires des grands sentiments de l’humanité, aussi bien ceux du désir que ceux de la répulsion, ceux qui se rattachent à Eros et ceux qui s’enchaînent à Thanatos.
Janvier 2010, Marie-France Briselance et Jean-Claude Morin publient « Grammaire du cinéma »**, où ils étudient comment sont nés les éléments du langage filmique, pourquoi tous ces éléments sans exception ont été découverts de 1891, date du premier film de l’histoire du cinéma, à 1908, date à laquelle Griffith découvre le dernier élément qui permet aux films de 1910 à 1930 d’être représentatifs d’un âge d’or du cinéma muet. Et comment ces éléments se sont développés au fil des décennies pour créer les figures de style qui caractérisent l’œuvre des grands cinéastes.
Septembre 2013, le dernier opus qui boucle leur trilogie, « Le Personnage »***, sort en librairie. Reprenant le principe de recherche chronologique qui a prévalu dans la « Grammaire du cinéma », et celui de la recherche des fondamentaux humains dans « Les 36 situations dramatiques », « Le Personnage » répond d’abord à la question suivante : dans quelle région du globe la fiction a-t-elle vu le jour ? Sans nulle doute en Égypte, là où le premier État s’est développé, le long d’une ligne féconde, la vallée du Nil, qui a permis d’accumuler des richesses et de développer les arts en tant que représentations symboliques du pouvoir. L’Égypte, justement, qui nous raconte, il y a 5300 ans, sa légende fondatrice, celle d’Isis et d’Osiris. Les protagonistes de ce récit sont originaux, ils ne sont pas les allégories que l’on trouve plus anciennement dans les religions primitives, celles de la terre, du feu, de l’eau, du ciel, en un mot de tous les éléments qui sont notre décor familier ou lointain, et dont nous dépendons tous. Ils sont des dieux, mais avant tout ils sont des incarnations, des êtres en chair et en os, avec les sentiments qui les accompagnent. C’est sur ce point important qu’ils diffèrent des dieux tutélaires. Ils connaissent toute la gamme des passions humaines, la colère ou la faiblesse, aussi bien que la tendresse ou la jalousie. Ils ne représentent pas la matière brute, ils nous ressemblent, ils sont faits à notre image. Ils sont le cœur battant de la fiction. Or, si la légende d’Isis et d’Osiris est la première œuvre de fiction, la conséquence logique de cette affirmation est que tous les personnages de toute la fiction à travers le monde et à travers les époques, tous menés par les mêmes passions humaines, descendent d’un des personnages de la légende égyptienne, qui sont autant d’archétypes fondateurs.
** Nouveau Monde éditions, ISBN 13 : 978-2-84736-458-3, 588 pages.
*** Nouveau Monde éditions, ISBN 13 : 978–2–36583–834–5, 437 pages.